La nausée - Jean-Paul Sartre
"Il y avait un pauvre type qui s'était trompé de monde. Il existait, commes les autres gens, dans le monde des jardins publics, des bistrots, des villes commerçantes et il voulait se persuader qu'il vivait ailleurs, derrière la toile des tableaux, avec les Doges du Tintoret, avec les graves Florentins de Gozzoli, derrière les pages des livres, avec Fabrice del Dongo et Julien Sorel, derrière les disques de photo, avec les longues plaintes sèches des jazz. Et puis, après avoir bien fait l'imbécile, il a compris, il a ouvert les yeux, il a vu qu'il y avait une maldonne" (page 246)
Antoine Roquentin, le narrateur de ce récit écrit sous la forme d'un journal intime, est historien. Il travaille à l'écriture d'une biographie de M. de Rollebon. Quand on lit ce récit, on se rend compte petit à petit que son narrateur est en train de vivre un profond changement : il voit la vie différemment. C'est précisément cela qui lui donne la nausée : il ne faut pas chercher de sens à la vie ; on existe, c'est tout. Ce n'est pas un récit facile à lire, il faut aller chercher le sens des mots assez loin. Le mieux, je pense, serait de s'aider d'un petit livre décryptant le sens des chapitres et des différentes évolutions de ce personnage.
"Ca ne va pas! ça ne va pas du tout : je l'ai, la saleté, la Nausée. Et cette fois-ci, c'est nouveau : ça m'a pris dans un café. Les cafés étaient jusqu'ici mon seul refuge parce qu'ils sont pleins de monde et bien éclairés" (page 36)
"Voici ce que j'ai pensé : pour que l'événement le plus banal devienne une aventure, il faut et il suffit qu'on se mette à la raconter. C'est ce qui dupe les gens : un homme, c'est toujours un conteur d'histoires, il vit entourré de ses histoires et des histoires d'autrui, il voit tout ce qui lui arrive à travers elles ; et il cherche à vivre sa vie comme s'il la racontait. Mais il faut choisir : vivre ou raconter. [...] Quand on vit, il n'arrive rien. [...]" (page 64)
Référence
La nausée, Jean-Paul Sartre, éditions Folio, 250 pages